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[1996] MurUEJL 35
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Propos Sur la Médiation en Matiere Civile
Author: |
Serge Braudo
Conseiller honoraire, Cour d'appel de Versailles
|
Issue: |
Volume 3, Number 4 (December 1996)
|
- Il y a des questions qui d'une manière cyclique reviennent
à la surface des choses, s'enlisent, puis disparaissent un temps
pour reparaître plus tard, pour disparaître à nouveau et
présenter ensuite un regain d'intérêt.
- La médiation judiciaire fait partie de ces questions. Les
conciliateurs institués par le décret No 78-381 du 20 mars
1978 ultérieurement modifié ne paraissent pas avoir
donné les résultats espérés pour régler
les petits litiges.
- L'avant-projet de loi destiné a devenir un grand texte
inséré dans le Nouveau Code de Procédure Civile que la
Chancellerie avait préparé avait donné lieu à
des débats difficiles devant l'Assemblée Nationale. Le projet
en était resté à ce stade.[1]
- Il semble pourtant bien que sous la pression des
difficultés de plus en plus grandes rencontrées par les
juridictions civiles pour inscrire les affaires au rôle de leurs
audiences, que l'on ait quitté le domaine de la réflexion
doctrinale au point que l'on puisse en espérer dans un temps proche
que la médiation judiciaire fasse l'objet d'une loi.
- Les institutions n'ont pas de valeur en elles mêmes, leur
qualité, bonne ou mauvaise, dépend de l'utilisation que les
hommes en font. Ce que ce texte apportera effectivement à nos
institutions judiciaires, on ne peut guère en parler d'une
manière exhaustive tant que le projet ne se sera pas
transformé en dispositions qui seront ajoutées aux
dispositions existantes et que l'on n'aura pas un recul suffisant pour
juger quels avantages la pratique en aura retiré. On se limitera
pour l'instant à quelques réflexions sur cette
démarche que constitue la médiation, qui hors du cadre
juridictionnel, tend à apporter la solution à un conflit. Il
convient notamment de comparer la médiation à d'autres voies
auxquelles ont est tenté de l'associer et d'en faire ressortir les
caractères qui lui sont propres.
- Certes, le juge civil dispose de la possibilité de
concilier les parties.[2] Cette faculté se
retrouve dans plusieurs passages du Nouveau Code de Procédure
civile. La tentative de conciliation préalable au débat
contentieux est, dans certains cas, une voie procédurale obligatoire
[3] mais concilier les parties requiert du juge qu'il
y consacre beaucoup de temps. Est-il besoin d'affirmer que dans
l'état des rôles des audiences, le souhait du
législateur s'est avéré irréaliste, et qu'il
reste en état d'un voeu pieu. La pratique montre que, dans les
faits, les parties se dérobent à la conciliation. Il suffit
d'assister à une audience d'un tribunal d'instance pour le
constater. Et si les conseillers de Prud'hommes y réussissent
généralement mieux que le juge d'Instance c'est que le
salarié est pressé de recevoir son dû, et que de son
côté l'employeur répugne à apparaître
comme un mauvais patron aux yeux de ses pairs comme aux yeux du reste de
son personnel. Enfin, la pression syndicale n'est peut être pas sans
effet sur un comportement conciliant.
- Rien de tel dans la plupart des autres types de conflits civils
dans lesquels le sentiment de se sentir frustré engendre un
état passionnel. L'aveuglement qui en est la conséquence
empêche le plaideur de prendre en considération son
intérêt. Tout praticien constate que les blessures d'amour
propre inspirent le plus grand nombre des différends, et que quand
elles ne les inspirent pas, elles les nourrissent.Dans ces conditions
chacun des antagonistes se refuse d'emblée à toute
conciliation. Une fois le procès civil introduit, le plaideur se
sent engagé dans un processus dont il estime, ne devoir sortir que
reconnu vainqueur; il attend du juge non pas qu'il apaise les esprits mais
qu'il sanctionne son adversaire. Dans son esprit la sanction qu'il attend
du juge s'apparente à la sanction répressive.
- Le fait en particulier de penser que le procès se
déroule en public, que les reproches que les parties
s'échangent pas leurs avocats puissent être entendus des
personnes qui assistent aux débats, n'est pas étranger
à exacerber leur ressentiment, même si, dans les faits, les
salles d'audience ressemblent de plus en plus à des séances
de mise en état.
- L'intransigeance du plaideur est d'autant plus grande qu'il est
déterminé à ne plus entretenir de relations avec son
adversaire.
- A l'opposé d'une telle situation, il arrive que les parties
conçoivent que les attaches d'ordre personnel, familial, social ou
économique qu'ils entretenaient avant la naissance du conflit, vont
malgré le différend qui les oppose, subsister après le
procès. Pour ceux que le maintien de ces liens va contraindre
à conserver des rapports raisonnables, la médiation comme
l'arbitrage, présentent alors une alternative
préférable à une solution juridictionnelle de leur
conflit.
- On est souvent tenté de rapprocher la médiation de
l'arbitrage en ce que dans un cas comme dans l'autre on se trouve en
présence de voies de solutions non-juridictionnelles d'un
différend. On met en avant la rapidité, la
confidentialité, le fait que les parties puissent avoir recours
à des personnalités qu'elles désignent eu égard
à leur grande expérience, ou à leur
notoriété, et ces raisons motivent le choix de la
médiation et de l'arbitrage.
- Cependant la médiation peut à certains
égards, constituer une alternative préférable à
l'arbitrage. En effet celui qui accepte de recourir à la
négociation ne se trouve pas engagé dans un processus qui
conduit à une solution qui lui est imposée. Contrairement
à la procédure d'arbitrage qui est contraignante puisque sauf
accord unanime, les parties ne peuvent s'en départir, la
médiation reste totalement facultative. Elle ne peut être
imposée aux parties et même une fois qu'elles ont consenti
à négocier, chacune d'elles peut renoncer librement à
poursuivre les pourparlers. La circonstance que les pourparlers ont
été rompus, ne les empêche pas d'engager un
procès ou de poursuivre une instance déjà introduite.
Les parties qui ne souhaiteront pas un procès public ou qui
estimeront obtenir par ce moyen une décision plus rapide, pourront
éventuellement recourir à la procédure d'
arbitrage.
- La médiation, on le voit, est différente d'un autre
type d'intervention qui est prévu par certains textes, lesquels
imposent aux parties de négocier. L'obligation de négocier
que l'on trouve particulièrement en droit social mais aussi dans
d'autres branches du droit,[4] n'est pas de l'essence
de la médiation. C'est de même un abus de vocabulaire d'avoir
désigné sous le nom de Médiateur, ce haut personnage
de l'Etat dont le rôle est d'intervenir auprès des
administrations publiques avec lesquelles un usagé peut avoir un
différend et qui dispose d'un pouvoir qui ne ressort nullement
à la compétence d'un négociateur.Pareillement, en
matière de conflits entre un assuré et sa compagnie
d'assurances on a désigné à tort médiateur cet
agent de la compagnie dont le rôle consiste à recueillir les
doléances d'un client et d'être son interlocuteur
obligé.
- Qu'en est-il de la médiation judiciaire?
- On pourra prétendre que le négociateur ayant
été désigné par justice, il ne s'agira pas
d'une véritable médiation. A celà il convient de
répondre que dans le cas où la négociation est
demandée par les parties comme dans le cas où elles
acquiescent à la proposition du juge, ce dernier ne fait que
répondre à leur voeu. On reconnaîtra que ce n'est pas
parce que les parties, qui se sont convenues de régler leur conflit
en s'adressant à un tiers, voire au Président du Tribunal ou
au juge chargé de la mise en état pour lui demander de
désigner l'arbitre ou le médiateur, que l'on ne se trouve
plus dans un cadre conventionnel. Sauf donc si le texte attendu devait
permettre au juge d'imposer aux parties de négocier, ce qui on l'a
vu ne serait plus une médiation, il reste que la mesure judiciaire
par laquelle à la demande des parties ou avec leur assentiment, le
juge désigne un négociateur, constitue une
médiation.
- Une fois saisi, ou bien le médiateur parvient à
rapprocher le point de vue des parties, dans ce cas la médiation se
termine par un accord transactionnel et le procès engagé
devient sans objet, ou bien la négociation échoue et elles
restent alors dans la même situation que celle qui était la
leur avant l'engagement de la négociation. Il ne leur reste plus
alors qu'à continuer l'instance simplement suspendue. Elles peuvent
aussi envisager éventuellement un arbitrage. Rien
n'empêcherait d'ailleurs que le médiateur parvienne à
faire accepter aux parties un accord partiel, ce qui peut, dans de nombreux
cas, débloquer une situation qui leur était
préjudiciable. Dans cette hypothèse elles abandonnent au juge
le soin de régler la partie du différend pour la solution
duquel elles n'ont pu parvenir à s'entendre.
- L'échec des négociations peut faire naître une
difficulté relativement au fait que médiateur est soumis
à l'obligation du secret.
- Le juge qui reprend le cours de l'instruction de la cause soit
après que la négociation ait échoué soit
après que les parties aient transigé sur une partie de leurs
prétentions, ne doit pouvoir prendre connaissance ni des
propositions successives que se sont échangées les parties ni
des informations que le médiateur a pu recueillir au cours de la
négociation. Si les choses devaient être autrement les parties
ne seraient pas incitées à consentir à négocier
sachant qu'en cas d'échec, le tribunal pourrait être mis par
le médiateur en possession d'informations qui pourront servir
à sa décision, alors qu'en l'absence de médiation, il
n'aurait pas fait état de ces faits dans le cadre du procès.
La rupture des négociations ne doit pas transformer la
médiation qui a échoué en une mesure d'information, ni
modifier l'office du juge qui reste tenu au respect des principes
directeurs du procès.
- De ce fait, la situation dans laquelle se trouve le
médiateur, sa mission achevée, soit que la négociation
ait échoué, soit qu'elle ait réussi ne se
réduit pas à celle d'un témoin. Et l'obligation au
secret sur tout ce qui a touché à la négociation, ne
prend pas fin avec elle. S'il en était autrement, chacune des
parties pouvant connaître les propositions secrètes qui ont
été confiées par l'autre au négociateur, ne
manqueraient pas de faire état de ce que les informations
recueillies par le médiateur qui ne leur ont pas été
transmises, auraient dû leur permettre de négocier dans des
conditions qu'après coup elles estimeraient plus favorables. Et les
parties pourraient à nouveau se trouver en conflit. Si donc la
négociation vient à échouer, le médiateur ne
doit pas pouvoir être appelé par l'une des parties ou par le
juge à témoigner sur le sens des informations qui ont pu
être données par l'une d'elles sous le sceau de la confidence
ou qu'il aurait pu recueillir à l'occasion de la négociation.
Il doit même rester étranger à l'interprétation
des dispositions de l'accord transactionnel qui a été
rédigé en sa présence et qui pourrait
ultérieurement s'avérer incomplet ou confus.[5]
- En raison de ce qu'il se termine par une décision,
l'arbitrage est soumis aux principes directeurs du procès.[6] En conséquence, comme le juge, l'arbitre est
tenu d'observer le principe du contradictoire, le principe du respect de
l'objet et de la cause du litige.[7] En revanche, la
médiation ne conduit pas à un acte de juridiction
contentieuse. Le rôle du négociateur est circonscrit à
la conduite des pourparlers menant à une conciliation qui est
l'oeuvre des parties. La médiation se caractérise par une
suite d'offres et de contre-propositions qui aboutissent à une
convention. La solution qui met un point final au litige n'est
imposée aux parties que par leur propre détermination et non
par un jugement ou par une sentence rendue par un tiers.
- Dans la succession des contacts que le médiateur entretien,
il joue le rôle d'un catalyseur. Il prend toutes les initiatives
propres à obtenir une convergence des points de vue en
présence et même sans qu'il soit tenu à tenir les
parties informées de ses diligences. Le médiateur
débute généralement ses opérations en
consultant séparément chacune d'elles mais rien
n'empêcherait qu'en une seule réunion rassemblant toutes les
parties, il parvienne à les accorder. Le mouvement de va-et-vient
qui caractérise habituellement son action lui permet de tenir
alternativement informé chacun des adversaires des
prétentions que l'autre l'a autorisé à
dévoiler. Il peut tenter d'obtenir des accords partiels. Pour
parvenir à la convergence des offres et des acceptations, il peut se
faire remettre, sous le sceau du secret, les concessions ultimes que
chacune des parties est décidée à ne faire que si les
propositions qui ont été déjà faites, ne sont
pas acceptées. A la limite rien ne s'oppose à ce que les
parties ne se rencontrent jamais et que les signatures de l'acte final qui
consacrent leurs accords définitifs soient apposées
alternativement dans des lieux différents.
- Pour définir les voies et moyens mis à la disposition
du médiateur, il ne peut donc exister aucune règle
générale.
- C'est le négociateur qui en fonction de l'humeur
manifestée par ses interlocuteurs, et des circonstances dans
lesquelles se déroulent les pourparlers, fixe le rythme, la nature,
le thème et le lieu de ses contacts et qui décide si les
parties doivent ou non être mises en présence. On comprend
dans ces conditions que, dans le cas où la médiation
viendrait à échouer et que les parties ayant renoncé
à la procédure judiciaire, elles décideraient d'avoir
recours à l'arbitrage, le médiateur refuse sa
désignation en qualité d'arbitre.
- La connaissance qu'en sa qualité de médiateur il a pu
avoir de faits qui ont pu lui être révélés par
l'une ou l'autre des parties sous le sceau du secret, peut faire craindre
que la sentence soit influencée par les confidences qu'il a pu
recevoir en qualité de négociateur. Et si aucun secret ne lui
a été confié, compte tenu de ce que chacune des
parties ignore si des informations de ce type ont pu être transmises
au médiateur à l'autre partie, la personne que la sentence
arbitrale n'a pas satisfaite pourra penser que le médiateur devenu
arbitre a pu pour former sa conviction, utiliser une information recueillie
au cours de la médiation qui n'a pas été
discutée au cours de la procédure contradictoire. L'arbitre
ne devant être l'objet d'aucune suspicion, il paraît hautement
préférable que le médiateur qui a échoué
dans sa tentative, refuse de continuer à connaître de
l'affaire en qualité d'arbitre.
- La liberté qui appartient aux parties de rechercher une
solution à leur conflit dans la médiation est-elle
limitée? Et si elle l'est existe-t-il des hypothèses
où le juge devra s'abstenir de proposer aux parties de
désigner un médiateur? En d'autres termes la question est de
savoir si la médiation propose des solutions originales au
problème du respect de l'ordre public.
- On connaît le problème qui se pose à
l'arbitre.[8] En raison de ce qu'on
ne peut transiger ou
compromettre dans les causes intéressant l'ordre public et sur ce
quoi les parties n'ont pas la libre disposition, on a longtemps interdit
aux parties de procéder par voie d'arbitrage dans toutes les
matières qui intéressent l'ordre public. On peut se trouver
tenté
de penser que le pouvoir donné au médiateur se trouve soumis
aux mêmes limitations que celui dont dispose l'arbitre et qu'en
particulier dans les matières où la loi a donné
compétence exclusive au juge, le médiateur ne saurait
recevoir des pouvoirs que ce dernier tient de la loi de régler des
litiges dont l'objet est exclusivement réservé à sa
connaissance.
- La question du risque de voir les parties négocier sur un
objet qui ne pourrait être soumis à l'arbitrage ne parait pas
pouvoir se poser au médiateur judiciaire. C'est que si l'arbitre
tient son pouvoir des parties, en revanche, le médiateur est
nommé par justice. C'est là toute la différence mais
elle est essentielle car pendant le déroulement de la
procédure arbitrale, le juge ignore tout de ce qui se déroule
hors de son contrôle. Le fait de savoir si l'arbitre s'est vu confier
un différend arbitrable et le fait de savoir si la sentence qu'il a
rendue déroge ou ne déroge pas à la règle
d'ordre public ne peut être envisagée qu'a posteriori lors de
la procédure d'exequatur. En revanche dans le cas de la
médiation judiciaire, la négociabilité de l'objet de
la cause se trouve nécessairement appréciée par le
juge avant qu'il ne prenne la décision de désigner le
médiateur. Si donc dans une affaire il devait se poser une question
touchant à l'ordre public, le tribunal ne devrait pas manquer, soit
de régler dans un jugement préparatoire la partie du
différend qui ne serait pas négociable, soit de rejeter la
demande des parties tendant à la désignation d'un
négociateur.
- En tout état de cause on doit remarquer que par le seul fait
que le médiateur n'intervient dans le processus de
négociation que pour préparer les parties à dresser
l'acte final, l'interdiction qui est faite de déroger à la
règle impérative, ne s'adresse qu'aux parties. Si
malgré tout, ce problème avait échappé au juge
il resterait au médiateur de lui en faire rapport afin que
l'incident soit réglé avant qu'il ne commence ses
opérations.
- L'application de toute nouvelle règle apporte son lot
d'incertitudes, mais il serait vain de rechercher des solutions à
des problèmes que la pratique sera amenée à
résoudre au fur et à mesure qu'ils se poseront. L'institution
d'une médiation qui sera judiciaire par l'origine de la mission
donnée au médiateur mais à laquelle on ne saurait
enlever le caractère contractuel, laisse la porte ouverte à
de nombreuses interrogations portant en particulier sur le fait de savoir
si l'institution d'une médiation judiciaire ne va pas modifier
l'office du juge.[9]
- Il n'est pas besoin de démontrer que médiateur ne
remplit pas une mission assimilable à celle d'un expert : le rapport
de l'expert contient un avis qui constitue une aide à la
décision, ce que ne peut devenir celui du médiateur. En
effet, la circonstance que ce dernier est tenu de conserver secret le
contenu des pourparlers pendant comme après la négociation, a
pour conséquence que le compte-rendu que le médiateur sera
amené à remettre au juge ne contiendra qu'une information
limitée au seul effet de lui faire savoir que la négociation
a ou n'a pas été couronnée de succès.
- Ainsi, en cas d'échec des pourparlers, réserve faite
du cas où interviendrait une transaction partielle laquelle, dans
certains cas, pourrait constituer une convention préparant la
décision du juge, celui-ci n'en saura pas d'avantage sur les
circonstances de l'affaire. A l'opposé, chacune des parties tiendra
probablement, par le seul fait de l'échange des offres, des
renseignements qu'il aura recueilli au cours des pourparlers. Si donc, la
négociation aura quelque fois pour effet de leur faire
préciser ou de limiter leurs prétentions, en revanche, dans
la plupart des cas, on peut s'attendre à ce que la procédure
reprenne devant le juge dans l'état où elle a
été interrompue.
- Et le risque demeure que le désir manifesté par l'une
des parties de suspendre le cours du procès en sollicitant la
désignation d' un médiateur cache une intention
délibérée de ne pas poursuivre la négociation
à son terme. Retarder la procédure contentieuse, tenter de
connaître quel sacrifice l'adversaire est prêt à
consentir pour mettre fin au différend,peut constituer le seul but
poursuivi.[10] Le juge auquel sera
présentée une demande tendant à la désignation
d'un médiateur devrait donc être très attentif à
cet aspect des choses. Dans la mesure où il le pourrait, il faudrait
qu'il puisse se trouver en mesure de vérifier que le désir de
négocier est motivé.
Notes
[1] Pierre Estoup: "Etude et pratique de la
conciliation" in D.1986 Chr. p.161 et "Le Projet de
Réforme de la Procédure Civile " in Gaz.Pal.1989 (1er
sem.) p.176. Alain Lorieux: "Place de la Médiation dans le
Procès Civil in".Gaz.Pal.1991 (1er sem.) p.66 et les
références citées par ces auteurs.
[2] Nouveau Code de Procédure Civile,
articles 21, 127 à 131, 830 à 835.
[3] Ex: en matière de divorce et de
séparation de corps, ou de saisie sur les salaires, devant le
tribunal d'instance, le Conseil de Prud'hommes et le Tribunal des Affaires
de Sécurité Sociale.
[4] Jean Cedras: "L'obligation de
négocier "in Rev.Trim.Droit Commercial avr-Juin 1985 p.264 -
Bruno Oppetit "Arbitrage, Médiation et Conciliation " in
Revue de l'Arbitrage No 3 oct.déc.1984.p.307.
[5] Cf. Alain Lorieux se référant au
projet gouvernemental de 1990 envisage cependant le cas où la
négociation ayant échoué, les parties demanderaient
expressément au médiateur de rapporter au juge les
constatations qu'il aurait faites au cours de la médiation et les
déclarations qu'il aurait recueillies.
[6] art.1460 alinéa 2 C.Civ et Eric Loquin
"Arbitrage : L'instance arbitrale" Juris- Classeur
Procédure Fasc.1036 No 66 et ss.
[7] Une médiation, peut trouver son
aboutissement ailleurs que le cadre de l'objet du litige.Un
différend portant sur la concession d'un brevet peut conduire
à une prise de participation dans une société,
à la cession d'un fonds de commerce,ou à un accord portant
partage d'une clientèle.
[8] Cf Pascal Ancel in Juris-Classeur Procédure
civile Fasc.1024, aussi "Arbitrage et procédures collectives
après la loi du 25 janvier 1985" in Revue de l'Arbitrage"
No 2, avril-juin 1987 p.127.
[9] Pierre Estoup "Le Projet de Réforme
de la Procédure Civile " déjà cité.
[10] sur la liberté de contracter source
d'abus, Jean Cedras déjà cité cf. Chap. 5 de son
étude ainsi que les études de doctrine et la jurisprudence
citées sous les notes 26 et 27. Le législateur
éviterait bien des interrogations en édictant que "Sauf
l'accord unanime des parties pour déroger au caractère
confidentiel des pourparlers, lorsque pour quelque cause que ce soit la
négociation a été rompue, aucune d'elles n'est
recevable à faire état devant le juge, des faits, des
démarches, des propos, ou des écrits, révélant
les offres qu'elles ont échangées et les circonstances dans
lesquelles elles ont négocié".